Cet exemple est significatif de ce qu'aujourd'hui les artistes et les citoyens en général peuvent, dans les rapports de force qui les opposent aux différents pouvoirs, obtenir à force de motivation et de compétences diverses dans le domaine de la communication.
En tout état de cause, il apparaît clairement (c'est en tout cas notre point de vue…) que les artistes devraient commencer, eux-mêmes, par tenter d'assainir, leur propre milieu, le milieu de l'art contemporain, livré quasi entièrement aux puissances financières et aux forces marchandes de l'art.
Depuis une trentaine d'années, nous assistons, sans réaction significative des artistes, à une prise en main des valeurs esthétiques et symboliques par le marché. Ce dernier ne se cantonnant pas uniquement désormais à les diffuser et à les commercialiser, mais maintenant à les produire et à les imposer. Cela a été rendu possible par un asservissement progressif des institutions aux puissances marchandes. Les institutions, qu'elles soient privées ou publiques, limitant leur rôle à consacrer des valeurs qui sont, de fait, l'émanation et le choix exclusif du système marchand. Les institutions, par un comportement d'une très grande ambiguïté, valident ainsi purement et simplement les objets que le système marchand leur impose.
Le paradoxe veut ainsi que ce ne soit plus les artistes qui prescrivent les valeurs
et les créent, mais ceux qui détiennent le pouvoir de l'argent. C'est
à dire ceux qui manipulent l'information à travers les revues d'art, les
expositions phare, comme la documenta de Cassel ou celle de Venise, ou celles des
grands musées indirectement à la solde des grands opérateurs du
marché les ventes aux enchères de caractère international.
Afin de fonder notre discours sur des exemples concrets, nous
citerons, ici , trois cas emblématiques de cette collusion. Le troisième
exemple peut être considéré comme un cas d'école !
Premier exemple. La confusion des rôles : artiste ou industriel ?
Le publicitaire Saatchi, membre du conseil d'administration de la Tate Galery, valorise ses propres collections, les négocie et les commercialise en fonction des labels que sa position d'influence lui permet de leur conférer.
Deuxième exemple. Pressions du système sur une commissaire.
Catherine David, lors de la documenta de Cassel de 1997, dont elle est commissaire générale, est pratiquement désavouée et marginalisée par les médias et par ses pairs, pour avoir refusé les compromis (compromissions) habituelles, que les commissaires de ce type d'expositions doivent entretenir avec le marché afin de labelliser sur ordre certains artistes.
Troisième exemple : collusion hommes politiques/ maison de vente/grand
financier/ commissaire général / artiste.
Jean-Jacques Aillagon, actuel ministre de la culture en France, remet la légion
d'honneur à l'artiste américain Jeff Koons dans les bureaux de Christies à
Paris, dont le propriétaire n'est autre que François Pinault milliardaire
français et amis personnel de Jacques Chirac Président de la République
Française. Jean-Jacques Aillagon, par ailleurs commissaire général pour la
célébration de l'an 2000 en France et donc de l'exposition de la Beauté
à Avignon (été 2000 coût 80 millions de francs) offre
généreusement la vedette de cet événement à
l'américain Jeffs Konns (paradoxe bien connu de tous les institutions
françaises ont la spécialité de favoriser les artistes
étrangers, en snobant quelque peu leurs propres ressortissants…) Dernière
information : nous apprenons que François Pinault s'est porté
acquéreur de l'œuvre exposé à Avignon pour un montant de 11
millions de francs ...
Chirac>Aillagon>la beauté Avignon>Pinault> Chisties>légion d'honneur et retour et plus-value programmée, voilà une circulation assez édifiante en elle-même qui renseigne sur les liens qui lient le politique, l'art, et l'argent. L'attribution de la légion d'honneur, à défaut peut-être de connaître les faits d'armes et les services rendus à l'Etat Français par l'artiste américain Jeff Koons, à de quoi nous laisser passablement dubitatif à moins d'être prochainement informé à ce sujet…
Il est de toute évidence, qu'il appartient aux artistes, les premiers, de se
solidariser et de s'organiser, en vue d'entreprendre un vaste nettoyage des écuries
d'Augias. Ce qui n'était pas envisageable hier, l'est devenu aujourd'hui, du fait de
l'existence d'Internet. Internet avec son potentiel de reliance et de diffusion de
l'information. Internet = le pouvoir de se connaître + le pouvoir de se
reconnaître + le pouvoir de s'organiser + le pouvoir de faire sa propre information +
le pouvoir de la diffuser + le pouvoir d'agir, tous ensemble et en concertation. Les artistes
doivent se réapproprier un territoire qui est de droit le leur et que les forces de
l'argent au fil du temps lui ont confisqué, en faisant de lui dans ce système,
tout au plus, un opérateur de second ordre, un opérateur chargé de
la production de la marchandise (sans laquelle ni le marché, ni les institutions ne
pourraient exister…) et dont ils ne retirent au pis aller que d'une infime partie des profits
générés.
Dans ce combat où l'intelligence et le savoir-faire du réseau seront
les atouts premiers des artistes, le pot de terre ne pourra plus se briser contre le
pot de fer, puisque que le pot de terre devient un pot " virtuel ". Un pot virtuel,
qui ne pourra plus tomber en morceaux, ni en poussière, contre un pot de fer que
ne représentera plus, dans une société d'information et de
communication, qu'un élément