Les attaques contre les impressionnistes,

ces communards !

_______________

Résumé

Aujourd'hui, il est courant de lire que les toiles des impressionnistes scandalisaient et faisaient rire, les auteurs se plaçant exclusivement sur un plan artistique. Ils les considèrent également comme des révolutionnaires au sens artistique.

L'impressionnisme se situe cependant dans un contexte de division politique importante et après l'épisode sanglant de la commune. A l'époque les impressionnistes ont été confondus abusivement avec des révolutionnaires politiques, les communards qui faisaient peur à toutes les classes sociales. Ils ont donc en réalité subi des attaques en grande partie politique.

Repères chronologiques :

1870 Déclaration de guerre à la Prusse de Napoléon III et écrasement de la France ; Déclaration de la 3ème république le 4 sept. ;
1871 Révolution sanglante de La commune du 28 mars au 21-27 mai
1874 Première exposition impressionniste
1875 La république cesse d'être provisoire et on s'écarte de la royauté
1980 Amnistie des communards
1889 Menace d'une dictature militaire par le général Boulanger
1894 Attentats anarchistes
1898 Article de Zola "J'accuse"
1917 Révolution russe

Une époque troublée et sanglante qui a frappé les esprits. Marx écrira un livre sur la commune. Courbet fera tomber la colonne Vendôme.

Napoléon III dictateur belliqueux entra en guerre contre l'Allemagne en 1870. Une de plus car la France avait été en guerre au cours des vingt dernières années avec une demi-douzaine de pays et pas mal de victoires ! Quinze jours après la chute de Sedan, les Prussiens arrivèrent devant Paris et l'encerclèrent. Ci-contre, le siège de Paris par Meissonier. Refusant les négociations de paix du gouvernement de Adolphe Thiers aboutissant à l'occupation partielle de Paris ainsi qu'une énorme indemnité de guerre, la Garde Nationale refusa de déposer les armes. Cette révolte aboutit à la naissance de la commune pendant deux mois dirigée d'abord par des patriotes puis par des révolutionnaires, les communards. En reconnaissant le communard Raoul Rigault, Renoir a échappé de justesse à une exécution. Ces communards adoptèrent le célèbre drapeau rouge !

Courbet était président d'une commission des artistes de la commune (Corot, Daumier, Edouard Manet, Millet,..) et proposa la démolition de la colonne Vendôme surmontée d'une statue de Napoléon Ier. Ce qui fut fait le 16 mai.

Le 21 mai, les troupes régulières versaillaises entrèrent dans la ville et tuèrent plus de parisiens que de communards : 20 000 exécutions sommaires. Les troupes ayant gagné, on passa à la case suivante : les règlements de comptes de milliers d'inculpés par la justice militaire. Paris perdit d'un coup 100 000 habitants.

Ci-contre, photo de Disdéri, Cadavres de communards exécutés

Dans ce contexte, Courbet fut arrêté et n'eut que six mois de prison. Mais l'assemblée Nationale publia un décret exigeant le remboursement des frais de restauration de la colonne Vendôme : plus de 300.000 francs. Courbet s'enfuit en Suisse et reviendra en France pour mourir peu de temps après en 1877.

Ainsi le peintre non-conformiste Courbet était un communard qui avait fait tomber la sculpture de Napoléon et par association Manet et les impressionnistes furent suspectés d'être révolutionnaires mais au sens politique !

Dans un contexte de division profonde de la société entre républicains, bonapartistes, monarchistes, communards, être considéré comme un communard n'était pas sans conséquences.

Les articles suivants l'illustrent.

Le journal Le Gaulois qui approuve les peintres indique qu'on les assimile à des communards. C'est d'ailleurs l'opinion de La Revue politique et littéraire.

L'article de Georges Maillard dans Le Pays est également relatif à la politique "Au fond, ce sont, je crois, des mécontents, des radicaux de la peinture, qui, ne pouvant trouver de place dans les rangs des peintres réguliers, se sont constitués en société, ont arboré une bannière révolutionnaire quelconque et ont organisé [une] exposition."

Le Moniteur universel, journal officiel de l'empire Français : "... Les intransigeants de l'art donnant la main aux intransigeants de la politique, il n'y a rien là, d'ailleurs, que de très naturel." 11 avril 1876.

Les attaques étaient en grande partie politiques

On comprend mieux la violence des attaques au début des expositions impressionnistes donc juste après la commune. Ces attaques se calmeront par la suite avec la stabilisation de la république.

- Celle de 1874 se déroula dans les locaux mis à disposition par le photographe Nadar et aura un bilan médiocre. L'exposition fut la proie des journaux humoristiques

- la vente aux enchères de l'Hôtel Drouot du reliquat de l'exposition de 1874 fut l'objet de hurlements de mépris et de railleries d'après Durand-Ruel qui se trouvait là en qualité d'expert

- Celle de 1877 dans un appartement vide dans la même rue que la galerie d'art de Durand-Ruel souleva d'après Théodore Duret le rire, le mépris, l'indignation, le dégoût. Les affaires furent mauvaises comme la vente aux enchères à l'Hôtel Drouot qui suivit. Les peintres faillirent être attaqués par des groupes d'individus au cris de "Communards".

Pour le livre Le Journal de l'impressionnisme, il est hors de doute que les peintres furent l'objet d'une attaque organisée de caractère politique. Si ces peintures dégoûtaient ces visiteurs, pourquoi venaient-ils spécialement aux expositions impressionnistes ou aux ventes de l'hôtel Drouot si ce n'est pour casser du Communard ? Paris ne manque pas de distractions !

Après l'épisode sanglant de la commune, les impressionnistes ont été confondus abusivement avec des révolutionnaires politiques, les communards. Ils ne l'étaient pas en grande partie et venaient d'un milieu aisé pour la plupart.

Certains étaient antidreyfusards : Renoir, Cézanne, Degas (aussi Toulouse-Lautrec, Rodin, Paul Valéry,...). Quelle honte ! Le chef de file des antidreyfusards est Maurice Barres qui affirme "Que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race !". C'est curieux dans aucune biographie de ces artistes, on ne rappelle ce fait...C'est vrai que cela ne colle pas avec une image progressiste...
D'autres étaient Dreyfusards : Pissaro (israélite), Monet, Signac.

Les impressionnistes connaissaient de nombreux anarchistes. Guillaumin, Pissarro et Gauguin étaient anarchistes. Pissaro avait le projet d'écrire un livre les turpitudes sociales. Gauguin en 1883 fait passer la frontière au leader révolutionnaire Zorilla caché dans une charrette de foin après l'échec d'une insurrection en Espagne !

Par un glissement de sens de l'histoire, les impressionnistes sont devenus aujourd'hui des révolutionnaires au sens figuré dans le domaine artistique et non au sens politique.

 

Copyright Philippe Declerck

Me contacter.

English
Accueil Général
Sociologie
Galerie Declerck
! Impertinent !
Menu-Tableaux

Tutelle littéraire
Tutelle historiens
FRAC
Méprisé
influençable
FRIC !

Légendes
Pré-impressionn.
Rejet
Finances
Formation
Classiques
Politique
Soutien

Courbet
Manet
Cézanne
Zola
Van Gogh

Incohérents
Gigantisme
Contemporain
Polémique

Mes préférés
Annuaires
Motivations
Coulisses